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Droits de succession : 6 techniques à mettre en place pour être moins taxé

Publié le 18.05.2019 - Source Mieux Vivre

Pour limiter les droits sur les successions, la stratégie idéale est d’anticiper par le biais de donations. On peut presque tout mettre en place, en fonction de ses objectifs et de sa situation familiale. Voici plusieurs solutions à étudier et à mettre en œuvre.



Il est toujours possible de transmettre en échappant aux fortes ponctions étatiques. La technique à privilégier: les donations. Voici six solutions adaptées à toutes les situations.

1. Donner à intervalles réguliers pour profiter des abattements

Les règles en matière de donation sont simples. Avant l’application des barèmes d’imposition, les bénéficiaires de vos largesses ont droit à des abattements. Ces derniers s’élèvent à: 100.000 euros pour vos enfants; 31.865 euros pour vos petits-enfants ; 5310 euros pour vos arrière-petits-enfants ; 15932 euros entre frères et sœurs ; 7967 euros au profit des neveux ou nièces. En revanche, les donations à toute autre personne, y compris des non-parents, sont consenties sans bénéficier d’aucun abattement. Seule exception: les personnes handicapées, quel que soit leur lien de parenté avec le donateur, profitent d’un abattement de 159.325 euros se cumulant avec les autres (soit,par exemple, 259.325 euros pour un enfant handicapé).

Ces retranchements jouent tous les quinze ans et le fisc ne pourra pas les contester sur le fondement de la redéfinition de l’abus de droit. Une fois cette durée écoulée, le donataire aura à nouveau droit à l’abattement. En revanche, si une donation intervient avant l’échéance, le fisc appliquera directement le barème de l’impôt aux montants concernés. La technique est une véritable aubaine fiscale à condition de posséder un patrimoine suffisamment important pour en abandonner une partie sans espoir de retour (voir toutefois le point 3). Car la formule enfantine « Donner, c’est donner, reprendre, c’est voler » reflète une réalité juridique : on dit « Donner et retenir ne vaut » pour signifier que les biens offerts sont définitivement acquis au donataire sauf cas extrêmes. Exemple: un donataire qui tenterait d’éliminer son bienfaiteur !

Idéalement, les donations doivent être consenties seulement une fois que votre patrimoine est solidement constitué, en général vers 55-60 ans. En effet, si vous avez des héritiers réservataires (vos enfants), il faut préserver leur part, vos multiples dons ne devant pas y porter atteinte. Hormis cette précaution, on peut transmettre des grosses sommes sans aucun impôt et le fisc ne trouvera rien à y redire. Un couple de 63 ans réalisant une donation à chacun de ses deux enfants, puis une autre quinze ans plus tard, parviendra à transférer 800.000 euros de patrimoine net (100.000 euros du père à chaque enfant et 100.000 euros de la mère à chaque enfant, soit 400.000 x 2). Ils peuvent procéder de façon identique pour leurs petits-enfants, les dons non taxables sur la même période s’élevant à 254.920 euros. Au total, les deux générations gratifiées auront ainsi reçu 1.054.920 euros sans avoir à régler un centime d’impôt. On peut aller encore plus loin en recourant aux dons familiaux en espèces, appelés dons Sarkozy, qui permettent de transmettre en sus des abattements évoqués ci-dessus 31.865 euros tous les quinze ans à chacun de ses descendants ou, à défaut de descendance, à ses neveux et nièces. Seule restriction: le donateur doit avoir moins de 80 ans et le bénéficiaire, être majeur.

2. Donner en gardant l’usufruit des biens

Avec le vote dans la loi de finances 2019 de l’abus de droit pour « raisons principalement fiscales » (qui sera mis en œuvre en 2020), les notaires s’inquiétaient de la remise en cause des donations avec réserve d’usufruit. Or, si l’objectif de ces dernières est d’anticiper une succession en gardant un droit sur les biens, c’est aussi une recherche d’économie d’impôt.


Quand vous donnez en conservant l’usufruit, seule la nue-propriété est imposée. Sa valeur est déterminée par l’article 666 du Code général des impôts en fonction de l’âge des donateurs. Elle est de: 60% de la valeur totale du bien si ces derniers ont entre 61 ans et 70 ans ; 70% s’ils ont entre 71 ans et 80 ans ; 80% entre 81 et 90 ans ; et 10% à partir de 91 ans. L’intérêt d’une telle libéralité, c’est que l’usufruit ne sera jamais taxé. Au décès de l’usufruitier, il s’éteint et revient au nu-propriétaire automatiquement.

Il n’y a pas, selon les principes du droit civil, de transmission et le fisc ne peut donc taxer. Le gain n’est pas négligeable. Prenons l’exemple d’un père qui, à 70 ans, donne à son fils la nue-propriété d’un appartement de 500.000 euros. Etant donné son âge, elle est évaluée à 300.000 euros et les droits exigibles, après abattement de 100.000, euros, seront de 38.194 euros. Son fils deviendra pleinement propriétaire à son décès sans impôt supplémentaire. En revanche, s’il lui donne la pleine propriété, la taxation sera beaucoup plus lourde en raison d’une assiette plus large. Le fils devra alors s’acquitter de 78.194 euros au Trésor public. Revenir sur les donations avec réserve d’usufruit serait très pénalisant pour le donataire.


Bercy a mis fin à l’inquiétude en précisant qu’elles ne seraient pas visées par les redressements pour abus de droit à but principalement fiscal. Mais, à notre avis, il faudra être prudent car les propos du ministère des Finances demeurent, à ce jour, assez vagues. Pour éviter tout risque, l’usufruitier doit exercer pleinement les droits que lui confère le Code civil. Avec ce nouveau dispositif, les contrôleurs pourraient être tentés de requalifier la donation s’il n’utilise pas le bien transmis. Concrètement, cela signifie, pour un immeuble, qu’il ne l’occupe pas ou n’en tire pas des revenus locatifs, préférant en laisser la disposition ou en abandonner les loyers au nu-propriétaire.

Ce type de comportement reste toutefois assez rare dans les faits, car contraire à l’intérêt de la donation avec réserve d’usufruit. Il est même plutôt courant (et recommandé) dans l’acte de donation d’inscrire et d’améliorer les droits de l’usufruitier. Avec de telles dispositions, vous ferez d’une pierre deux coups : vous préservez vos droits et le fisc ne pourra vraiment plus rien contester ! S’il s’agit d’un immeuble, il faut insérer une clause stipulant que l’usufruitier pourra revendre le bien sans l’assentiment du nu-propriétaire et racheter un autre actif sur lequel sera reporté le même démembrement. Pour la transmission d’un portefeuille de valeurs mobilières, il est essentiel d’inclure une convention de quasi-usufruit permettant à l’usufruitier de gérer ses titres et de procéder librement à des achats et reventes.


3. Donner avec retour conventionnel et clause d’inaliénabilité

Les parents peuvent vouloir donner, tout en se préoccupant du sort futur du bien. C’est une situation classique lorsque l’enfant que l’on souhaite gratifier n’est pas marié et n’a pas de descendance. Dans la pratique, ce sont exclusivement des immeubles qui font l’objet de telles opérations. En cas de décès de l’enfant avant ses parents, les biens transmis se retrouvent inclus dans la succession. Selon les règles de dévolution successorale, les actifs du défunt reviennent à ses parents s’il n’a pas de frères ou sœurs. S’il en a, son père et sa mère reçoivent chacun un quart de ses biens.


Dans les deux situations, ils devront payer des droits de succession. Autrement dit, le fisc se sera servi deux fois : lors de la donation de l’immeuble à l’enfant et lors de la succession de ce dernier et du retour du bien dans le patrimoine des parents. Prenons un exemple. Des parents donnent à leur fils un appartement d’une valeur de 300.000 euros. Après application des abattements (2 x 100.000 euros), les droits se chiffrent à 16.388 euros. Le fils décède dix ans après sans époux ni descendance et frères et sœurs. Le logement vaut alors 350.000 euros: les parents sont taxés à hauteur de 26.388 euros.

Pour éviter cette double ponction, il faut prévoir une donation avec clause de retour conventionnel et interdiction d’aliéner (c’est-à-dire de vendre). Cela ne change rien au calcul des droits lors de la donation. Mais si votre enfant célibataire et sans enfant décède avant vous, le bien donné n’entrera pas dans sa succession. Il vous reviendra de plein droit et les autres héritiers éventuels ne pourront pas exiger sa réintégration dans le patrimoine successoral du défunt. Vous n’aurez rien à verser au Trésor. Il faudra uniquement faire intervenir le notaire, seul autorisé à effectuer les formalités de publicité foncière et à enregistrer les noms des nouveaux propriétaires au cadastre et à la conservation des hypothèques. L’appel à ce professionnel vous coûtera entre 1 et 2% de la valeur du bien.


4. Donner en payant les droits en lieu et place du donataire

Ceux qui veulent donner à des parents éloignés hésitent souvent car le taux de prélèvement sur ces donations est tellement élevé qu’il enrichit surtout le fisc. Si, par exemple, célibataire et sans enfant, vous voulez trans mettre 150.000 euros à une nièce, la facture sera salée. Vous pourrez lui consentir un don en espèces (don Sarkozy) non taxé dans la limite de 31865 euros, mais la ponction sera rude sur le surplus (118.135 euros). Après un abattement de 7967 euros, votre nièce sera taxée à 55%. Le montant qu’elle devra au fisc sera de 60.592 euros. Autrement dit, elle n’aura reçu au total, don et abattement compris, que 89408 euros.


Il existe heureusement une solution pour diminuer la facture : la loi autorise le donateur à payer avec ses deniers les droits dus par le donataire. C’est fiscalement très intéressant car ce paiement n’est pas considéré comme un complément de donation. La taxation est donc calculée sur le montant réellement perçu par votre nièce, qui est moindre. Et c’est là tout l’intérêt de l’opération. Seule contrainte: le don doit comprendre des espèces qui seront destinées à payer l’impôt.


Reprenons notre cas. Une fois le don Sarkozy déduit et l’abattement appliqué, la part taxable se monte à 110.168 euros. Si vous décidez de prendre en charge les droits, votre nièce recevra réellement 71.076 euros et vous paierez 39092 euros de droits (71.076 euros x 55%). Vous aurez déboursé exactement la même somme, 150.000 euros, et votre nièce touchera 110.908 euros (31.865 + 7 967 + 71.076 euros), soit 21.500 euros de plus. L’utilisation de cette disposition est à l’origine d’une grande économie d’impôt pour les transmissions entre frère et sœur avec des taux d’imposition de 35 et 45%, entre oncle/tante et neveu/nièce taxées à 55%, ou entre non-parents avec un prélèvement de 60%, c’est-à-dire chaque fois que les taux d’imposition sont très hauts. Il faut y penser systématiquement pour toutes ces donations et en parler à votre notaire.


5. Donner à toutes les générations avec l’accord de vos enfants

Les notaires conseillent souvent la donation-partage afin d’assurer, disent-ils, « la paix des familles ». Cet acte permet de prévoir la répartition précise des biens entre les différents donataires. L’avantage fiscal au moment de sa réalisation n’est pas important. Les abattements et le barème sont appliqués normalement, en fonction du lien de parenté entre le ou les donateurs et les bénéficiaires. Seul le droit de partage, dû pour tout acte de répartition de biens, de 2,5% sur la valeur des actifs, n’est pas exigible.

A la succession, en revanche, la donation-partage se révèle être un atout majeur. Dans une donation simple, si vos enfants ont reçu des biens dont la valeur a beaucoup changé au cours du temps, à la hausse ou à la baisse, il faudra en tenir compte à votre décès. C’est la règle du rapport civil qui oblige le notaire à réintégrer la valeur réactualisée des donations dans votre succession afin de recalculer les parts de chacun au risque de désavantager l’un de vos héritiers par rapport à l’autre. Cette règle du rapport est écartée avec la donation-partage, les biens concernés restant hors succession. L’usage de la donation-partage n’est pas réservé aux seuls enfants. Elle peut associer enfants et petits-enfants du vivant même de leurs parents. Il suffit que ces derniers consentent dans l’acte à ce que leurs propres enfants bénéficient de la donation à leur place.


Dans un même acte réglant définitivement la transmission d’une partie de votre patrimoine, vous multiplierez ainsi les abattements. Prenons un exemple. Vous transmettez à vos deux enfants 600.000 euros, sachant que l’un d’eux donnera ensuite sa part de 300.000 euros à vos deux petits-enfants. Avec ces deux donations, l’addition fiscale atteindrait 92.776 euros. Si vous faites une donation-partage transgénérationnelle, 300.000 euros à l’un de vos descendants, comme dans le premier cas et 150.000 euros directement à chacun de vos deux petits-enfants, les droits seront de 81.836 euros, soit une économie de 10.940 euros. Cette différence s’explique par le fait qu’il y a trois parts taxables et non plus deux.

Une autre technique est utilisable : la donation graduelle. Vous donnez un bien à un enfant et à son décès, il reviendra à un autre de vos enfants. Ce montage est conseillé pour assurer un logement ou des revenus à un enfant fragilisé (handicap, pauvreté) n’ayant pas de descendant, sans pour autant défavoriser les autres. Si vous faites une donation simple d’un appartement de 300000 euros à votre fille handicapée, sachant que son frère en héritera, ses droits seront seulement de 6329 euros en raison du cumul de deux abattements (100.000 euros + 159.325 euros). Mais au décès, son frère devra verser 125.388 euros (abattement de 15.932 euros et taxation aux taux de 35% sur la somme n’excédant pas 24.430 euros et 45% au-delà de ce montant). Si, en revanche, vous faites une donation graduelle, les droits seront toujours de 6329 euros pour votre fille mais votre fils ne paiera plus que 31.865 euros. En effet, au décès du premier gratifié, le second bénéficiaire est taxé en fonction de son lien de parenté avec le donateur initial et non avec le défunt. De plus, les droits déjà réglés par le premier sont imputés sur ceux dus sur le même bien par le second bénéficiaire.


6. Donner à vos enfants mariés et à leurs conjoints

Vos enfants sont installés professionnellement et leur couple est solide, mais il leur manque un « nid douillet ». Vous êtes est alors tenté de faire donation d’un bien immobilier à votre fils et à votre bru ou à votre fille et votre gendre. Malheureusement, c’est particulièrement coûteux car votre belle-fille ou votre beau-fils n’a aucun lien de parenté avec vous, n’a droit à aucun abattement sur ce qu’il reçoit de vous et il est taxé à 60%. Ainsi, dans le cas d’une donation par un père d’un bien de 200.000 euros à son fils et à sa belle-fille, les droits exigibles seront de 60.000 euros. Mieux vaut faire une donation à votre seul enfant puisque les droits seront réduits à 18194 euros.

Si vous souhaitez que le bien appartienne au couple, il suffira de demander au notaire d’insérer dans l’acte de donation une clause d’entrée en communauté. Elle est juridiquement et fiscalement incontestable. Votre fils ou votre fille aura mis automatiquement en commun le bien reçu et votre générosité bénéficiera au couple. A défaut d’une telle clause, le bien donné restera la propriété exclusive de votre fils ou de votre fille, ce qui est normalement le cas de tout actif reçu par donation. Vous pouvez préférer cette option si vous n’avez aucune confiance dans les « pièces rapportées ». Mais, attention, votre enfant peut malgré tout transformer la donation en bien commun, par exemple en concluant un contrat de mariage de communauté universelle en cours d’union. Pour éviter cela, il suffit de prévoir dans l’acte de donation une clause d’exclusion de communauté.

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